mardi 30 juin 2015
lundi 29 juin 2015
Billets-Zone euro : vive la Grèce libre !
Zone euro : vive la Grèce libre !
Ses créanciers
(l’Eurogroupe, la BCE et le FMI) avaient tendu un piège gros comme l’Acropole à
Tsipras. Ils débloquaient «jusqu’à» 15,3 milliards d’euros pour permettre à la
Grèce de faire face à ses obligations d’ici l’automne prochain sachant, qu’avec
ces fonds, les Grecs devaient rembourser un minimum de 10,8 milliards d’euros
d’ici fin août ! Bref, avant la fin 2015, Tsipras aurait totalement consommé
son capital politique et retrouverait les mêmes inextricables difficultés
financières, prisonnier d’un euro dont le taux de change rend impossible la
relance de l’économie hellène. Sa fragile et composite majorité parlementaire
se serait délitée. La nomenklatura européenne aurait pu alors tranquillement le
faire déposer par une sorte de coup d’État semblable à celui qui lui avait
permis de changer les gouvernements grec et italien en 2011.
Tsipras, par son
référendum, évite ce piège et met ses créanciers au pied du mur : soit ils
épongent les dettes grecques pour les deux à trois prochaines années de
remboursement, soit ils s’assoient sur la totalité de leurs créances. La
semaine qui s’ouvre va être du plus haut intérêt ! Visiblement, les Eurocrates
ne s’attendaient pas à tomber sur un dirigeant retors qui a su tirer les leçons
des échecs subis par ses prédécesseurs. La formation trotskiste, ça a du bon…
Si la Grèce quitte la
zone euro, il ne faut pas paniquer, nous disent désormais à l’unisson banquiers
centraux et politiciens. Le fait que Valls vienne le rappeler doit nous inciter
au plus grand scepticisme, connaissant sa grande clairvoyance dans tous les
domaines. La BCE rachète déjà environ 60 milliards d’euros de dettes publiques
chaque mois. Il lui faudra en absorber beaucoup plus dans les semaines qui
viennent car, outre les créances sur la Grèce qui ne vaudront plus grand chose
et dont les trésors publics voudront se débarrasser, beaucoup d’obligations
émises par les pays du Sud vont commencer à devenir suspectes. Si la BCE ne
parvient pas à endiguer une remontée brutale des taux d’intérêt, le déficit des
pays mal gérés, la France en premier lieu, se creusera vite, créant un effet
auto-entretenu de tension sur les marchés.
Depuis vingt ou trente
ans maintenant, l’Europe a compensé son déficit démocratique par la
distribution de crédit, finançant des dettes contre l’abdication de la
souveraineté. Mais la construction d’un projet démocratique est délicat et
nécessite un long mûrissement alors que les crises financières se propagent à
la vitesse du feu sur la poudre. L’édifice vermoulu européen approche lentement
mais sûrement de l’écroulement.
Tsipras credits Lorenzo
Gaudenzi (CC BY-NC-ND 2.0)
Source contrepoints.org
dimanche 28 juin 2015
samedi 27 juin 2015
vendredi 26 juin 2015
jeudi 25 juin 2015
mercredi 24 juin 2015
lundi 22 juin 2015
dimanche 21 juin 2015
samedi 20 juin 2015
Billets-La Marche des lemmings de Serge Federbusch
La Marche des lemmings de Serge Federbusch
Du 7 au 11 janvier 2015, cinq jours ébranlèrent
la République française …
Dix-sept personnes assassinées, des
rassemblements dans tout le pays, une manifestation d’une ampleur inédite à
Paris : les crimes au siège de Charlie Hebdo, à Montrouge et dans l’hypermarché
casher de la Porte de Vincennes étaient les pires commis en France depuis des
décennies.
L’émotion populaire
balaya tout sur son passage, y compris une réflexion lucide sur ce qui s’était
vraiment passé. Car les terribles meurtres de janvier 2015 furent l’occasion
d’une manipulation qui restera un cas d’école.
Le pouvoir s’employa
d’abord à escamoter sa responsabilité dans la faillite des services de police
et de renseignement et dans la cavale extravagante des frères Kouachi et
d’Amedy Coulibaly qui ne furent localisés et abattus que parce qu’ils étaient
suicidaires et se cachaient à peine.
François Hollande et
son gouvernement firent également tout pour éviter, au nom du refus de
l’amalgame entre musulmans modérés et radicaux, l’examen des responsabilités de
l’islam de France et de la lâcheté politique face au fondamentalisme.
Mais les maladies dont
on nie la réalité finissent un jour par vous emporter. La mobilisation du 11
janvier 2015 fut aussi massive que stérile. Depuis, par un amer paradoxe et
malgré les discours officiels, la République recule devant les islamistes. Les
défilés des «Charlie», qui arboraient leur logo comme un talisman protecteur,
ne ressemblaient-ils pas en fait à une marche de lemmings, ces petits rongeurs
qu’on dit suicidaires parce qu’ils ne savent pas canaliser leurs pulsions
grégaires ?
Demain, seules une
laïcité sans compromis et la prise à bras-le-corps des problèmes économiques et
sociaux de la France pourront nous éviter le pire.
jeudi 18 juin 2015
mercredi 17 juin 2015
mardi 16 juin 2015
lundi 15 juin 2015
Recettes Pâtisseries orientales-Cornes de gazelle aux amandes
Cornes de gazelle aux amandes
Préparation : 45 mn
Repos de la pâte : 1 heure
Cuisson : 10 à 15 mn
Pour 15 gâteaux
Pour la pâte :
250 g de farine
1 pincée de sel
2 cuillerées à soupe de beurre fondu
1 cuillerée à soupe de miel
Pour la farce :
250 g d’amandes en poudre
100 g de sucre en poudre
1 pincée de sel
2 cuillerées à soupe de beurre fondu
2 cuillerées à soupe d’eau de fleur d’oranger
Pour la décoration :
1 jaune d’œuf
Amandes effilées
1. Préchauffez le four à 150 °C (th. 5).
2. Préparez
la pâte. Dans un saladier, mélangez la farine et la pincée de sel, puis
creusez un puits au centre. Versez-y le beurre fondu, le miel et 1 cuillerée à
soupe d'eau. Mélangez en ramenant la farine au fur et à mesure vers le centre.
Pétrissez longuement, en rajoutant un peu d'eau au besoin. Laissez reposer la
pâte pendant 1 heure à température ambiante.
3. Préparez
la farce. Mélangez les amandes en poudre, le sucre et la pincée de sel.
Ajoutez le beurre fondu puis l'eau de fleur d'oranger ; mélangez jusqu'à ce que
la farce soit souple mais compacte. Façonnez-la en petits boudins de la taille
d'un doigt environ.
4. Partagez la pâte en deux ou trois portions.
Étalez-la très finement (sur 2 mm d'épaisseur environ) sur le plan de travail
fariné. Posez un boudin de farce à 5 cm du bord et repliez la pâte par-dessus.
Appuyez autour de la farce pour bien souder la pâte, puis coupez celle-ci à
l'aide d'une roulette dentelée. Recourbez le chausson obtenu en demi-lune.
Répétez l'opération jusqu'à épuisement des ingrédients.
5. Dorez les cornes de gazelle avec le jaune d'œuf
dilué dans 1 cuillerée à soupe d'eau, puis passez-les dans les amandes
effilées. Déposez-les sur la plaque du four recouverte de papier sulfurisé.
Piquez-les de part en part en trois endroits à l'aide d'un cure-dent pour
éviter que la pâte se boursoufle à la cuisson. Enfournez pour 10 à 15 minutes.
Appelée « corne de gazelle » du fait de sa
forme, cette pâtisserie porte en arabe le nom de « kaab el ghazal », ce qui
signifie littéralement « cheville de gazelle ».
Billets-L'Etat de connivence de Jean-Marc Daniel
L'Etat de connivence de Jean-Marc Daniel
Contre l’État protectionniste, Jean-Marc Daniel
signe un essai novateur qui s’inscrit dans le sillage de la pensée de
l’économiste libéral François Quesnay. Jean-Marc Daniel économiste français,
est professeur d’économie à l’ESCP Europe. Il est également chroniqueur sur BFM
Business et directeur de la revue intellectuelle Sociétal. Il travaille
essentiellement sur la politique économique, dans ses dimensions théoriques et
historiques.
« Soyons clairs, l’élite de la fin du XXe
siècle était keynésienne, il faut que celle du XXIe siècle soit quesnaysienne
», écrit-il dans l’État de connivence, par référence au grand physiocrate
François Quesnay (1694-1774). Dans cet essai à la fois brillant et provocateur,
Jean-Marc Daniel analyse les mécanismes modernes de la rente et dénonce le
retour des rentiers. Oui il y a montée des inégalités, mais pas comme on le
croit !
Quesnaysiens contre keynésiens
Pour commencer,
Jean-Marc Daniel renvoie dos-à-dos les défenseurs néomercantilistes de la «
compétitivité », et les protectionnistes qui se cachent derrière des
néologismes comme la « démondialisation », tous héritiers de théories réfutées
avec succès par Quesnay dès le XVIIIe siècle. La stratégie mercantiliste
consistait à capter la croissance des autres pays, tout en protégeant un
appareil productif obsolète. Or cela se faisait au détriment du pouvoir d’achat
de la population qui subissait une dévaluation de sa monnaie et un coût des
importations élevé.
À la fin du XVIIIe
siècle, l’école de la physiocratie avait compris que la réponse au problème de
la dette publique et de la pauvreté était la croissance économique. Pour lutter
contre les banqueroutes à répétition et leur cortège de faillites, il fallait
permettre la concurrence et ainsi encourager le progrès technique. Dans son
éloge funèbre de François Quesnay, le comte d’Albion résumait ainsi les travaux
de l’économiste pour assurer la croissance : «
Restreindre autant qu’il est possible les frais des travaux, des transports,
des fabrications de toute espèce. On ne peut y parvenir sans dégradation et
sans injustice que par la liberté la plus grande de la concurrence […]. Il faut
donc sur le travail ni prohibitions, ni taxes, ni privilèges exclusifs. »
Selon Jean-Marc
Daniel, comme le préconisait François Quesnay, il est temps d’en finir avec la
tentation du protectionnisme, il faut renforcer le libre-échange, lutter contre
les « prohibitions », les « privilèges exclusifs », et miser sur la croissance de
l’offre productive à long terme, seule capable d’élever durablement notre
niveau de vie.
Comment l’État génère des rentes
Quels sont aujourd’hui
les vrais obstacles aux réformes structurelles dont la France a besoin ? Dans L’État de connivence, son dernier livre,
Jean-Marc Daniel répond en un mot : la connivence. De quoi s’agit-il ? D’un
copinage entre secteur public et secteur privé, sur le dos du consommateur et
du citoyen. Des entreprises cherchent auprès de l’État des protections financières
ou réglementaires. Elles veulent échapper à la concurrence et demandent à
l’État de les protéger contre la perversité du marché ou la déloyauté de la
concurrence. Autant de fausses justifications destinées à maintenir un niveau
de prix largement supérieur à ce qu’il devrait être.
Connivence entre un
patronat qui craint la concurrence par-dessus tout, une gauche protectionniste
et un gouvernement qui affiche des tendances colbertistes. Connivence organisée
autour du maintien des rentes de toutes natures, et notamment celles des nombreuses
professions qui vivent des largesses de l’État-providence… Connivence, donc,
garantie par l’État, sorti de son rôle. Et seule la concurrence permettra de
mettre fin aux privilèges. Toujours stimulant, Jean-Marc Daniel défend ici une
société fondée sur le talent plutôt que sur la rente.
Une citation
résume bien son propos. Elle provient de Luigi Zingales, dont s’inspire
Jean-Marc Daniel et dont j’avais traduit un article :
« Les Tea Parties dénoncent
l’accroissement du poids de l’État, le mouvement Occupy Wall Street dénonce lui
le poids et l’emprise énorme de grandes entreprises. Ce qu’ils ne comprennent
pas, c’est qu’ils combattent deux faces d’un même monstre : l’entremêlement
entre l’État mammouth et les grandes entreprises. » (A
Capitalism for the People: Recapturing the Lost Genius of American Prosperity)
Comme Zingales,
Jean-Marc Daniel préconise un capitalisme au service du peuple, un capitalisme
qui tourne le dos à la connivence pour permettre à chacun d’exprimer ses
talents en se confrontant aux autres sur des marchés concurrentiels. L’enjeu,
c’est la défense du « travailleur pauvre, mal
protégé par les syndicats fonctionnarisés, qui paie trop cher les produits, qui
subit une pression fiscale devenue confiscatoire pour payer une fonction
publique pléthorique ».
Les vraies fonctions de l’État
Selon l’auteur, l’État
ne doit pas se tromper de priorité : il doit contribuer à créer un
environnement favorable à l’élévation du revenu des pauvres, plutôt que de
chercher à taxer les riches au nom de la lutte contre les inégalités. L’impôt
sur le revenu est punitif, il n’aide pas les pauvres, il punit les riches. Le
but de la politique n’est pas d’abaisser une partie de la population. C’est au
contraire de faire émerger les talents.
La politique monétaire
américaine des années 2000, menée pour permettre à l’État de s’endetter sans
limites et à moindre coût, a échoué.
La concurrence est
l’outil privilégié de l’action publique. L’État ne doit pas s’interdire de
réfléchir à ses propres missions en termes de concurrence. Dans beaucoup de
domaines, il n’a pas besoin d’agir lui-même, il doit laisser le secteur privé
s’organiser. « De maître d’œuvre, il doit devenir maître d’ouvrage », écrit
Jean-Marc Daniel.
La concurrence est à
la fois le plus puissant outil de régulation et de redistribution et en même
temps le plus juste. C’est pourquoi l’auteur plaide pour la suppression du
statut de fonctionnaire, à l’instar de la Suède et pour la privatisation de
l’assurance maladie
Finalement,
conclut-il, nous sommes arrivés à un stade où nous pouvons changer radicalement
de direction. Le communisme est derrière nous, le keynésianisme également. Il
devient possible de revenir à Quesnay et à la concurrence.
dimanche 14 juin 2015
Billets-Poison présidentiel de Ghislaine Ottenheimer
Poison présidentiel de Ghislaine Ottenheimer
Et si le nœud de tous les blocages de notre
société relevait avant tout du fonctionnement de nos institutions ? Du fait
qu’un seul homme décide de tout sans pourtant parvenir à mener à bien les
réformes nécessaires ? Dans cet essai, paru aux éditions Albin Michel en avril
2015, Ghislaine Ottenheimer, journaliste et rédactrice en chef de Challenges,
livre, à partir de nombreux témoignages, une critique acerbe de la « monarchie
républicaine » en vigueur depuis 1962.
Fastes monarchiques du « nombril de la République »
« Quel homme peut s’occuper des frappes sur
l’État islamique à 10 heures, décider à 11 heures s’il faut poursuivre la
réforme des rythmes scolaires, recevoir à 12 heures un chef d’État étranger
pour préparer la conférence mondiale sur le climat, à 15 heures, arbitrer sur
le niveau de déficit, à 16 heures, nommer le président d’EDF, à 17 heures,
s’occuper des investitures pour les régionales… » (Jean-Louis
Borloo, ancien ministre de l’Écologie). Depuis l’adoption de l’élection du
Président de la république au suffrage universel, décidée par référendum en
1962, le Président est la figure toute puissante du gouvernement. Votée dans le
contexte particulier de 1962, où la nécessité de sortir de la guerre d’Algérie
pouvait justifier la consécration d’un pouvoir fort et clair, l’élection du
suffrage universel a mis en place un système monarchique faisant du Président
le « nombril de la République ».
Érigé au rang de
fierté nationale, notre faste monarchique se manifeste dans les moindres
détails. Dans le protocole républicain ou les conférences de presse où le
Président commence par un monologue et où le « droit de suite » est
interdit ; dans le vocabulaire d’Ancien Régime en usage au
« Château » (l’Élysée) où les « petits marquis » (les
conseillers influents) gravitent autour du « Pharaon » (le surnom
attribué à Chirac par ses conseillers) ; dans les nominations aux postes
clés dont le Président, seul, a la prérogative ; dans les cérémonies de
remise de la Légion d’Honneur… Si ces détails participent à l’image d’Épinal du
rayonnement français, ne faudrait-il pas se méfier de ce jeu de rôle permanent,
dont l’exubérance pervertit le système, et de ce pouvoir vertical où une
poignée de destins individuels a pris le dessus ?
En France, le budget
de la présidence s’élève à 101 millions d’euros. La Couronne britannique, elle,
fonctionne avec 38 millions d’euros. En France, l’élection du Président au
suffrage universel évite la formation de coalitions et l’absence de « shadow
cabinet » renforce le rôle de l’exécutif. En France, le rôle du Président
fait l’objet de quinze articles dans notre Constitution quand celui du Premier
ministre se cantonne à deux. En France, la « surprésidentialisation »
va de pair avec un amoindrissement des compétences du Parlement, qui se trouve
réduit à une « chambre d’enregistrement » : moins de 5% des lois
sont d’initiative parlementaire aujourd’hui. Pourquoi alors maintenir un
système aussi fermé où la discussion et la contradiction sont rendues quasi
impossibles ?
Dans Le Coup d’État permanent, François Mitterrand
s’était érigé contre la réforme de 1962 instaurant le suffrage universel. En
campagne présidentielle peu de temps après, pas un mot ne fait pourtant
référence à une nouvelle réforme des institutions. Cet exemple est
probant : la personnalisation du pouvoir garantit sa propre survie. Obsédé
par le maintien du régime, le pouvoir en place n’a aucun intérêt à remettre en
cause l’élection du Président au suffrage universel, véritable « clé de
voûte » – selon l’expression de Guy Carcassonne – de nos institutions.
Le cœur du problème : le verrou de 1962
Jusqu’au référendum de
1962, le Président de la république était élu par un collège électoral, fidèle
à l’essence parlementaire héritée des IIIe et IVe Républiques. Le 28 octobre
1962, la révision constitutionnelle adoptée par référendum à 62% introduit un
régime semi présidentiel où l’élection du Président passe par le suffrage
universel direct.
Perçue comme un
dévoiement de la Constitution de 1958, cette révision est déclarée
inconstitutionnelle par le Conseil d’État, s’attire l’« hostilité »
du Conseil constitutionnel et provoque une motion de censure du Parlement.
Malgré la fronde, Charles de Gaulle persiste : « ce que nous allons faire est à la limite de la
légalité (…). Si nous gagnons, nous pourrons dire que c’est légal parce que le
peuple le veut ». Si l’attentat du Petit Clamart et les difficultés
liées à la guerre d’Algérie devaient justifier l’émergence d’un
« sauveur » capable de prendre des décisions rapidement et sans
bavardage, la révision constitutionnelle de 1962 a consacré dans le marbre la
supériorité du Président au Parlement.
La France est « la seule Monarchie d’Europe » au sens du
« pouvoir d’un seul ». Récemment, les propositions de nouvelles
Constitutions se sont multipliées afin de donner davantage de pouvoir au
Parlement et moins au Président. Selon une étude, 62% des sondés se prononcent
même en faveur d’une nouvelle république. Les Français ne sont pas dupes et
sont las des éternelles promesses de réformes qui ne voient pas le jour.
L’héritage monarchique et napoléonien du Président tout puissant touchera-t-il
bientôt à sa fin ?
Qu’il s’agisse d’un
projet de VIe République ou d’une Ve République rénovée, une chose est sûre, le
système en place est épuisé et « l’avenir
des institutions sera au cœur de la prochaine campagne présidentielle »
(Claude Bartolone).
Billets-Être prof, c’est magique
Être prof, c’est magique
Professeur, c’est un
métier formidable et même le plus beau métier du monde selon la rumeur, très
varié puisque vous êtes tour à tour flic, nounou, voire éventuellement gardien
de zoo. C’est très formateur, cela permet d’envisager tout un tas d’options de
reconversion. C’est magique, et je ne vous parle même pas de mon CAP en
dépannage de photocopieuses, je ne comprends pas pourquoi certains collègues
râlent.
Bon, certes, il existe
encore des bahuts, pas nécessairement de centre ville, où il fait bon venir
bosser, où les élèves sont de vrais
élèves, pas toujours super brillants mais pas non plus super méchants ; j’irai
même jusqu’à prétendre que certains sont plutôt bienveillants envers leurs
professeurs, même quand on les châtie pour leur manque de boulot ou leurs
bavardages.
Je crois que l’on
devient professeur parce que l’on est tombé amoureux d’une discipline et qu’on
a plus que tout la volonté de transmettre aux plus jeunes ses bienfaits et tout
ce qu’elle peut apporter en terme de liberté, d’autonomie intellectuelle et morale.
Sauf à être issu de la COTOREP, nous nous doutons bien que les premières
années, nous serons confrontés à un public pas tout à fait acquis à la cause et
que nous devrons batailler sec pour espérer obtenir un résultat, même minime.
Pourtant, je pense que la réalité, dans certaines enclaves de la
République Française, dépasse ce que tout nouveau professeur pourrait imaginer.
Je le dis, et
pourtant, je suis une grande planquée de l’Éducation Nationale : professeur de
philosophie, je ne peux qu’être face à des classes de Terminale – générales ou
technologiques – et donc les rescapés de l’impitoyable sélection zélitiste
pratiquée à chaque étape de l’évolution de
l’apprenant par de méchants professeurs qui ne pensent qu’à stigmatiser.
Quand tout dérape, je pense à ce que subissent les collègues de collège, de
lycée professionnel, de seconde et au travail qu’ils fournissent, chaque
jour, pour essayer de civiliser des mioches décérébrés qui n’ont parfois plus
que leur folie pour s’imposer et exister socialement (Et je pense très fort à
Clemenceau).
J’ai eu le privilège
de travailler dans le pire établissement de mon académie en termes de résultats
– 60% de réussite en terminale au bachot en terminale ES, c’est dire s’il
faisait baisser les statistiques nationales – et j’en parle aujourd’hui comme si
j’avais survécu à la guerre. Une guerre intellectuelle, une guerre morale, la
guerre contre la bêtise et la couche crasse de propagande qui recouvre les
cerveaux de certains.
Dans cet échec massif
de l’Éducation Nationale à apporter un minimum d’autonomie intellectuelle aux
populations les plus défavorisées, il faut pointer les réformes qui ne cessent
de s’empiler au nom d’un pédagogisme tout rousseauiste que Rousseau lui-même
estime pouvoir être « chimérique et fau[x] ». Même Rousseau le dit,
mais ce n’est pas grave, on va continuer quand même, le niveau ne fait que
baisser depuis quarante ans, mais ce n’est pas grave, on va continuer quand
même : les sciences de l’éducation,
c’est comme les fruits et légumes, c’est bon, mangez-en cinq fois par jour.
La méthode globale a
été mise en place parce que la méthode syllabique était très très méchante
puisqu’elle supposait d’apprendre avant de goûter au plaisir de lire des textes
répétant les cinq mêmes mots appris par cœur le matin même; grâce à la loi Jospin,
la grammaire ne s’enseigne plus, charge à l’élève de découvrir des régularités
dans un texte. Résultat des courses : mes élèves – quel que soit
l’établissement, et je suis passée par tout à l’exception des lycées de
centre-ville – qui sont pourtant des miraculés et par conséquent, l’élite,
confondent, pour la plupart, la monstration et la possession, avoir, savoir et
être, tout en s’imaginant que si art est féminin, une « opignion »
doit, elle, être masculine. Pire, certains élèves, en fin d’année, continuent à
écrire philosophie « phylosophie », en expliquant que ce n’est pas
une faute mais de l’anglais, dans un Double Fail à peine perçu.
À vouloir mettre un
« apprenant » au centre du système scolaire, en refusant de parler de
transmission des savoirs et sauf à croire en la métempsychose, ils ont mis le vide au centre de tout. Malheureusement,
on ne raisonne pas sur du vide, on répète ce qu’on entend à la télévision et on
fait des dissertations de philosophie à grands coups de proverbes dans ta
gueule. (D’ailleurs, je suis devenue super forte en proverbes.)
On s’étonne de
l’augmentation des violences dans certaines banlieues mais très honnêtement, je
ne serais pas super contente non plus si l’État m’avait dépossédée de mon
esprit. Je crois même que je serais très en colère. Privés des mots, et bien
qu’ayant étudié à l’école Citoyenne et Festive de la République, il ne leur
reste que la violence brute, déchaînée, irraisonnable (et pourtant, je vous
jure, j’essaie, je fais de la « remédiation » toute l’année, comme on
dit rue de Grenelle, en espérant leur faire comprendre que c’est à eux avant
tout qu’ils font du mal en se comportant comme des débiles).
À force de vouloir envoyer des bisous plutôt que des réponses
fermes à des individus, on fabrique des bêtes ou des brutes, mais certainement
pas des esprits.
À force de confondre
le savoir, qui se mérite et requiert l’effort d’apprendre, avec un click sur
ouikipédia, on forme des consommateurs et des réceptacles à propagande. À force
de ne jamais les confronter à l’échec, on forme des gens qui imaginent que tout
leur est dû parce que c’est comme ça EPIcétout.
Le résultat, c’est que
dans certains bahuts, je n’enseigne pas la philosophie, je suis prof’ de
« Devenir responsable de ses actes ».
Déjà, ils se
retrouvent face à un mur, l’abstraction n’est pas possible pour ces élèves. Dès
lors, le voyage au bout des Idées démarre avec une roue crevée et un réservoir
à sec et ils le sentent bien. Je ne dis pas qu’ils sont capables de mettre des
petits mots dessus pour identifier le problème mais ils sentent bien que
quelque chose dysfonctionne. Comme cela ne peut évidemment pas venir d’eux,
cela ne peut venir que de moi. Les élèves diront alors que je suis trop
méchante, et l’Éducation Nationale, que je suis trop zélitiste.
La réalité, c’est que
pour ces élèves en perdition, je symbolise le baccalauréat, l’institution dans
sa froideur la plus brute, la porte qui va se refermer d’un seul coup sur le
coin de leur nez avec d’autant plus de violence que ce sera la première fois en
dix-huit ans.
La réalité, c’est que
certains parents ne nous aident pas : quand un élève me jette une chaise en
pleine figure (que j’esquive, heureusement, rassurez les enfants) et que sa
mère nous dit en substance et en pleurs, sachant que nous en sommes au minimum
à sa quatrième exclusion de l’établissement, « Je
ne sais plus quoi faire, il va trop loin, pourtant son père et moi on ne
l’éduque pas comme ça. Mais là, il va trop loin ! Je le prive de portable une
semaine », c’est moi qui ai envie de pleurer.
Mais tout ceci n’est
pas très grave, puisque les lycées sont de plus en plus éco-citoyens et
responsables, qu’on mange bio une fois par semaine à la cantoche, qu’on
réfléchit à proposer des menus végétariens, que l’ennui recule (merci m’ame
Najat), et que l’Éducation Nationale s’est donné comme projet de produire une
chaîne de montage 100% parfaite. Et puis nous, nous pouvons même ajouter
« entraînement Ninja » à notre curriculum vitae.
Prof’, franchement,
c’est magique. Je me demande pourquoi on râle.
Source contrepoints.org
samedi 13 juin 2015
vendredi 12 juin 2015
jeudi 11 juin 2015
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