dimanche 19 octobre 2014

Billets-Vive la "twittérature" !


Vive la "twittérature" !

Lors de la dernière Foire du livre de Francfort, la "Twitter fiction" a fait une entrée remarquée. Avec cette révélation : en matière de chef-d'œuvre, ce n'est pas la taille qui compte.
  
Il n'est pas le bienvenu à la Foire du livre de Francfort. "Repoussé contre une barrière. Dégagé par un gardien. Lui ai proposé 4,6 % des gains nets sur mon manuscrit. Rien voulu entendre." Voilà ce qu'écrit @bastseller depuis la Foire du livre de Francfort. Il réessaie plus tard en se faisant passer pour un Finlandais – "Ils n'oseraient pas refuser un auteur du pays invité d'honneur" –, mais toutes ses tentatives pour glisser son manuscrit entre les mains d'un éditeur se soldent par un échec.

Hans Bastseller nous fait le récit de ses mésaventures sur le réseau de microblogging Twitter. Sauf que Hans Bastseller n'existe pas. Il s'agit d'un personnage de fiction, inventé à l'occasion du premier festival de "twittérature" allemand. En coopération avec Twitter, les organisateurs de la Foire du livre de Francfort [du 8 au 12 octobre] avaient en effet décidé cette année de permettre à des auteurs de publier des "romans courts" sur le réseau avec le hashtag #Twitteratur. Derrière le nom de Hans Bastseller se cache en réalité l'écrivain Falko Löffler.

Zoë Beck et Anne Wizorek, elles, capturent des choses vues et entendues qui racontent de petites histoires. "Viens avec moi petite souris, on parle de livre électronique et tout ça. Tu m'écoutes ?" Il y a aussi Psaiko.Dino, le DJ du rappeur Cro (sur qui il a écrit un livre), qui nous donne son point de vue de musicien sur le salon : "parler.parler.parler".

Du grand art
L'idée que Twitter représente un nouveau potentiel littéraire n'est pas nouvelle. Reste encore à déterminer en quoi il consiste. Il est largement admis aujourd'hui que la contrainte des 140 caractères peut faire naître de superbes fulgurances linguistiques, et que Twitter est le royaume des aphorismes.

Force est pourtant de constater que les auteurs de tweets de la Foire du livre se contentent essentiellement de gentils petits messages. Le caractère novateur de la twittérature ne tient pas à la brièveté du format (qui caractérisent également le haïku [court poème japonais], l'épigramme ou l'aphorisme) mais aux fonctionnalités du réseau qui regroupe presque toutes les possibilités offertes par l'écriture en ligne.

On parle ici de récit en temps réel, des hyperliens, de la coécriture, de l'insertion d'images et de vidéos, de l'utilisation des caractères "@" et "#", du "RT" (re-tweet) et des histoires non linéaires.

Les personnages fictifs se rapprochent de la performance artistique lorsqu'ils interagissent à travers leurs propres comptes et font oublier la présence de l'auteur. Les lecteurs entrent en contact avec ces personnages et mettent un pied dans le récit lui-même. Le réseau ne fait pas de différence et crée une fiction qui entretient un rapport différent avec la réalité. Le site Internet du #TwitterFiction Festival met en avant une série d'exemples les plus réussis. On en retient une expérience de narration nouvelle et profondément immersive qui interpelle moins par son contenu que par sa remise en question de notre idée de l'art. Domaine de l'aphorisme poétique en temps réel, la twittérature peut aussi être du grand art.

Dessin de Cost, Belgique. 

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