samedi 5 janvier 2019

Billets-La Hulotte


La Hulotte

“La Hulotte, le journal le plus lu dans les terriers” fête son n° 100.
Elle ne hulule que deux fois l'an, pour raconter en dessins et en mots “les petits mystères des grands bois”. Vrai travail d'orfèvre, la revue naturaliste sort son centième numéro. Pousser les enfants à observer la nature qui les entoure, telle est la vocation de Pierre Déom, le papa de La Hulotte.


C'est à Boult-aux-Bois, microvillage des Ardennes, qu'elle niche. La Hulotte, à savoir « le journal le plus lu dans les terriers », fête cet automne son centième numéro. Une longévité et un succès étonnants pour cette revue naturaliste tous publics, qui raconte chaque semestre depuis quarante ans la vie des bestioles et plantes de nos forêts.
On y apprend tout sur le sphinx colibri (un insecte de 3 centimètres de long), la musaraigne étrusque (le plus petit mammifère du monde qui, avec ses deux grandes oreilles, « cherche à imiter son idole l'éléphant ») ou le martin-pêcheur. De petit format, la publication propose sous une couverture colorée une quarantaine de pages en noir et blanc. Qui mêlent un récit à la fois ultra documenté et ludique – jamais niais – et une foultitude de dessins minutieux.

  • Une demi-douzaine de salariés et 150 000 abonnés
C'est dans un atelier tout de bois et de verre que travaille son créateur Pierre Déom, « phobique social » (selon ses mots) de 64 ans, épaulé par une demi-douzaine de salariés, dont sa femme et sa fille. Grande tige sèche aux cheveux argent, ce fils d'un « ouvrier agricole très catho » se destinait à l'histoire. « J'étais un gosse de la campagne, mais ne connaissais rien à la nature. Quand je suis parti étudier à Charleville-Mézières, je me suis senti mal. » Retour donc à la terre pour le jeune instituteur.
En 1972, il participe à la création du réseau de clubs Connaître et protéger la nature, à destination des mouflets, et s'occupe du bulletin de liaison, qui devient La Hulotte. Le bouche-à-oreille enfle concernant ce drôle de périodique, jusqu'à générer une moyenne actuelle de 150 000 abonnés de tous âges. « Le journal est monté en flèche sans que je m'y attende, note son fondateur, en adoucissant son ton au fil des heures. Forcément, je me suis senti obligé de davantage creuser les sujets. »


  • Toiles d’araignée et arbres à deux pieds
Un travail de bénédictin, entre journalisme et analyse scientifique : six mois sont consacrés à chaque thématique (une par numéro) abordée. L'homme s'anime en évoquant les recherches de tous pays qu'il compulse, les documentaires qu'il visionne et ses propres expéditions sur le terrain. Pour traiter des toiles d'araignée, il investigue pendant dix ans. « Elles sont rarement photographiées sans la rosée esthétique qui les déforme. Je profitais des jours de brume pour les guetter très tôt le matin, quand les gouttes sont suffisamment fines pour ne pas peser sur les fils. »
Même perfectionnisme patient quand il se penche sur les « petits mystères des grands bois », arpentant les forêts deux décennies durant (!) pour dénicher « des arbres à deux pieds ou qui en avalent un autre ». Il écrit seul les – très longs – textes de sa revue, dessine aussi méticuleusement la faune et la flore, s'inspirant de Gustave Doré ou du zoologiste suisse Manfred Reichel.
Poursuivant, sans mollir, ce qu'on appelle une vocation, Pierre Déom souhaite « rendre les enfants conscients des richesses naturelles, les pousser à sortir observer ce qui les entoure ». S'il se dit idéologiquement proche du mouvement écologiste, il ne milite pas. Il n'en a pas le temps, avec cette ensorcelante Hulotte qui dévore sa vie et le pousse une heure par jour dans les bois voisins. Dernier sujet d'étude : les méandres du lierre, cet arbrisseau « extraordinaire, qui pousse plus vite que l'arbre attenant sans jamais l'étouffer ».

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