samedi 12 janvier 2013

Billets-Bernard Tapie



Photomontage Frédéric Godec d'après une photo de Yann Rabanier

Bernard Tapie, prof de journalisme ?
L'homme d'affaire qui s'est offert les journaux du groupe Hersant veut mettre en place une “charte d'attitude” dans les rédactions. 

Julia Roberts bientôt à Marseille ? Bernard Tapie l'a promis aux journalistes de La Provence, par la grâce d'un hypothétique partenariat avec le festival de Cannes. Le nouveau boss du quotidien marseillais, c'est lui. Tour à tour chanteur, vendeur de téléviseurs, homme d'affaires, animateur télé, président de l'Olympique de Marseille, député, ministre, taulard et comédien, le voilà désormais patron de presse, à quelques jours de fêter ses 70 ans. Sans doute son plus grand contre-emploi. Bernard Tapie n'a jamais porté la presse et les journalistes en très haute estime. Les a souvent invectivés. Parfois cognés. Ou a balancé leur matériel à la mer – c'était en 1993, une équipe de France 3 s'était un peu trop approchée du Phocéa, son yacht de l'époque.

Vingt ans après, il veut leur apprendre leur métier. Dans ses journaux – outre La Provence, il a mis la main sur Nice-Matin, Var-Matin et Corse-Matin –, il promet de mettre en place une « charte d'attitude » (sic). L'idée ? Que les journalistes s'en tiennent aux faits, rien qu'aux faits, et fassent fi des commentaires. Quid alors des enquêtes et des analyses pour les rechercher et les éclairer, les faits ? On ne sait pas encore quelles sanctions risquent les « fautifs ». Il paraît que Jean-Noël Guérini, pré­sident PS des Bouches-du-Rhône, en proie à de légers ennuis judiciaires, applaudit. Evidemment, les rédactions s'inquiètent. Tapie qui réinvente l'éthique journalistique, c'est comme si le médecin de Lance Armstrong prenait la présidence de l'agence antidopage : ça fait peur. Notamment aux syndicats, qui ne digèrent pas non plus le feuilleton qui a remis Tapie sur orbite.

Allié à l'actuel propriétaire des journaux, Philippe Hersant, héritier pourtant en faillite du « papivore » Robert Hersant et exilé fiscal en Suisse, il a raflé la mise grâce à l'argent du contribuable – en 2008, l'arbitrage impulsé par Nicolas Sarkozy dans l'affaire de l'ex-Crédit Lyonnais lui a permis de toucher 300 millions d'euros. Les Guignols ont vite fait de ressortir sa marionnette. PPD : « A l'OM, il avait réussi à gagner la Coupe d'Europe ; cette fois, c'est pas sûr qu'il gagne le prix Pulitzer. » Réponse de « Nanard » : « Le gagner, non, mais l'acheter, faut voir. »

Remis très largement à flot, il aurait pu se contenter de se la couler douce sur son nouveau yacht de 75,50 mètres – 3,5 de plus que le Phocéa –, malicieusement baptisé Reborn (« Renaissance », en anglais). Surtout après ce qu'il a vécu : porté au pinacle lors des années Mitterrand par une gauche en pleine conversion au néolibéralisme, un temps présidentiable, Tapie connut une déchéance spectaculaire – faillite personnelle et incarcération. Revanchard, il préfère retourner au combat. L'énergie et la gouaille, qui lui avaient permis de mettre Le Pen au tapis lors d'un mémorable débat télévisé en 1989, sont toujours là. La roublardise aussi. Il y a un mois, il affirmait ne pas être intéressé par les journaux du Midi. Et jure aujourd'hui que La Provence ne sera pas un tremplin pour la mairie de Marseille, en 2014. Ses (nombreux) adversaires politiques font donc bien de se méfier. C'est ce qui fascine chez Bernard Tapie : ce refus perpétuel d'écrire le mot « fin ».

 Bernard Tapie en six dates
1965 Premier disque signé Bernard Tapy.
1977 Rachète des entreprises en difficulté.
1986 Président de l'OM, anime Ambitions, sur TF1.
1992 Ministre de la Ville de Bérégovoy.
1993 Scandale du match truqué Valenciennes/OM.
2000 Joue au théâtre dans Vol au-dessus d'un nid de coucou.

Source Télérama 

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