dimanche 30 juin 2019

Infos santé : Sport et Santé-Réparation des ligaments de la cheville



Réparation des ligaments de la cheville

Vous vous tordez les chevilles à tout bout de champs. Vous avez bénéficié de nombreuses séances de kinésithérapie. Rien n’y fait ! On vous parlé d’intervention chirurgicale. Est-ce vraiment utile ? De quoi s’agit-il ? Et quelles sont les suites opératoires ?

Par Philippe PAILLARD, chirurgien du sport

Chaque jour en France, il se produit 6000 entorses de cheville. Cette blessure correspond à la lésion d’un ligament, une cordelette fibreuse reliant deux os entre eux. A la face externe de la cheville, on trouve 3 faisceaux ligamentaires s’étalant d’arrière en avant à la manière d’une patte de canard.


Ces structures contrôlant les mouvements articulaires se sont distendues ou rompues au cours d’entorses. Les petits récepteurs nerveux qu’elles contiennent sont abîmés et ne parviennent plus à informer le cerveau de la position de l’articulation. Dans l’immense majorité des cas le traitement classique est suffisant pour récupérer totalement. Il associe le repos sportif, une attelle et de la rééducation. Mais la complication la plus fréquente de l’entorse reste … la récidive !

  • Pour être opéré, il faut souffrir d’une instabilité de cheville !
Comme souvent, « l’indication chirurgicale résulte de l’échec du traitement médical ».  Le tableau habituel ressemble à celui de Thierry. Il y a quelques années, sur un takl, il a été victime d’une grosse torsion de cheville au foot. L’articulation avait gonflé et des trainées bleues … des ecchymoses … étaient apparues sous les reliefs osseux. Pris par le temps, il s’était contenté de mettre une bande et un peu de pommade. Il avait directement repris le foot à la disparition des douleurs. Très vite, sur un appui, le traumatisme avait récidivé. Malgré la kiné, les torsions sont devenues plus fréquentes. Sa cheville ne gonfle presque plus mais fait très mal. Elle ne saigne plus ! Aucun ligament ne se déchire désormais car ils ont souvent totalement disparus ! Dans ces conditions pas de «croute», pas de cicatrisation possible : l’immobilisation est inefficace. Alors, il faisait des strappings avant chaque entraînement. En fin de séance, quand la bande était détendue, il lui arrivait de se fouler à nouveau la cheville. Désormais, il ne peut plus jouer. Même les footings sont risqués et source d’appréhension et de douleur. L’autre fois, en se promenant dans la rue, il a marché sur un gravier, sa cheville est partie, il est tombé comme un pantin désarticulé. Thierry est victime d’une instabilité de cheville !

  • Pour être opéré, il faut présenter une laxité de cheville !
Vous l’avez compris, l’instabilité est le symptôme décrit par le patient qui se fait des entorses à répétition. La laxité correspond à la constatation par le médecin de mouvements articulaires de grandes amplitudes caractérisant la rupture des ligaments. Il est important de faire la différence car il est possible de se tordre souvent les chevilles alors que les ligaments ne sont pas distendus ! Désormais, avant d’opérer, des images doivent confirmer la rupture des ligaments. On effectue un «varus forcé».  Il s’agit d’une torsion progressive de la cheville réalisée sous radiographie. Elle permet de mesurer le déplacement des os et de quantifier la laxité. Entre des mains expertes, l’échographie est bien adaptée pour mener l’enquête car elle visualise les tissus mous. Mieux encore, l’IRM réalise une analyse globale de l’articulation et cherche d’autres causes d’entorse. Le scanner impose d’injecter un produit de contraste dans l’articulation pour mouler le ligament flasque ou déchiré.

  • Que va faire votre chirurgien ?
Puisque vos ligaments situés à l’extérieur de la cheville sont déchirés, il faut les remplacer.


Il serait insuffisant de vouloir les réparer. Ce sont désormais des petits moignons rétractés, amincis et fragiles. Pour reconstituer le faisceau antérieur, l’intervention la plus classique consiste à prélever une bandelette de membrane entourant le péroné, le périoste. On la découpe de haut en bas, on conserve son point d’accrochage inférieur,  on la bascule par-dessus la cheville et on la fixe de l’autre coté de l’articulation, sur l’astragale.




Une autre technique propose de prendre la moitié d’un tendon passant sur ce trajet. Malheureusement, ce dernier a pour mission de transmettre la force du muscle qui, en se contractant,  redresse la cheville et empêche les entorses … Mieux vaut lui conserver toute sa solidité !
Pour réparer le faisceau moyen, le chirurgien prélève une portion de la bandelette fibreuse qui cale les tendons passant en avant de la cheville.  Il la découpe de haut en bas, la bascule par-dessus l’articulation et la fixe sur le péroné.



Le faisceau postérieur n’est quasiment jamais déchiré. Il est inutile de le remplacer.

  • 6 semaines d’immobilisation sportive !
Vous restez environ 3 jours hospitalisé. On vous confectionne une botte en résine que vous conservez 6 semaines. Classiquement, pour bien faire coller les ligaments, l’appui est interdit. Néanmoins, 10 à 15 jours après l’intervention, quand la cheville est dégonflée et les cicatrices fermées, vous pouvez pédaler. Sur vélo de salle, il est possible de doser subtilement votre effort. Commencez par 5 minutes très faciles. Augmentez progressivement la durée. Moulinez, accélérez la fréquence du mouvement avant d’accroître les résistances. N’ayez crainte, le poids transmis aux pédales reste modérée et la cheville ne bouge pas ! Reprenez la forme cardiovasculaire.
15 jours après l’opération, pédalez en salle, faites de la musculation sans appui.
Faites de la musculation, du haut du corps bien sûr ! Mais aussi des jambes car de nombreux appareils proposent des exercices sans appui. A la maison, utilisez des élastiques. Pour reproduire les contraintes musculaires inhérentes à chaque réception de foulée, insistez sur le travail de freinage.  Faites de la presse et des sauts avec votre membre valide. Imaginez vos gestes techniques. Ainsi, votre cerveau entretient vos schémas de coordination !

  • A 6 mois, reprenez votre sport !
Après 6 semaines, le chirurgien enlève votre botte en résine. Vous reprenez l’appui. Vous débutez la rééducation. Le kinésithérapeute mobilise votre cheville en douceur et réveille vos muscles stabilisateurs. A 2 mois, vous marchez normalement.  Poussez plus fort sur le vélo. Commencez l’elliptique. A partir du 3ème mois, vous réalisez des exercices d’équilibre statique en salle de kinésithérapie. Au même moment, intensifiez l’elliptique. A vélo, mettez vous en danseuse. Débutez le stepper. Peu à peu, placez votre talon dans le vide afin de mobiliser votre cheville et travailler votre mollet. Dès que vous êtes à l’aise, trottinez quelques minutes. Si vous êtes anxieux, enfilez une chevillière pour vos premières foulées mais il faudra vite vous en débarrasser. Après 4 mois, courez sur terrain régulier. Accélérez dans l’axe. En rééducation, vous travaillez vos appuis latéraux. A 5 mois, vous renouez avec le terrain : déplacements latéraux, slalom et éducatifs spécifiques sont au programme. Enchaînez avec du collectif sans contact ou un adversaire sympathique qui vous fera répéter vos gammes. Quand vous vous sentez prêt, vers 6 mois, envisagez la compétition. Vos adversaires n’ont qu’à bien se tenir : vos cheville sont stables … et vous êtes en grande forme !

  • Entorses récidivantes ne signifient pas rupture des ligaments
Il est possible de se tordre les chevilles pour d’autres raisons. Le tendon stabilisant cette articulation peut se luxer et devenir inefficace. Des fragments d’os ou de cartilage se coincent parfois et bloquent les réflexes de protection. Après une entorse, il arrive que les récepteurs de tension situés dans les ligaments ne fonctionnent plus. Il faut les ré-entraîner, il faut insister en rééducation ! De nombreuses femmes dont les tissus sont très souples sollicitent peu ces récepteurs et se font souvent des entorses. Dans ces conditions, il ne produit pas de déchirure et les douleurs sont rares. A l’inverse, certains sportifs ont les ligaments détruits et ne se tordent pas les chevilles ! Ils bénéficient d’une exceptionnelle coordination. Ils pourraient néanmoins risquer une arthrose précoce du fait des micro-mouvements inévitables qui rabotent le cartilage.


Source SantéSportMag

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