jeudi 30 mai 2019

Infos santé : Sport et Santé-Le lumbago chez l’enfant



Le lumbago chez l’enfant

 Cet adage médical justifie un bilan diagnostique rigoureux pour éliminer une lésion osseuse en cas de douleur lombaire avant la fin de la croissance ! Alors, si votre petit athlète a mal en bas du dos, consultez votre médecin et lisez cet article !

Par le docteur Stéphane Cascua, médecin du sport.

La colonne est constituée d’un empilement de vertèbres séparées d’un petit amortisseur, le disque. Chacun de ces blocs se prolonge d’un arc osseux pourvu de deux petites articulations qui guident le mouvement à la manière de spatules de ski. Ce sont ces structures qui risquent de se fissurer chez l’enfant.


Illustration : Mathieu PINET

  • Colonne de jeune bipède sportif en danger !
Chez l’enfant, le disque intervertébral est souple. Il résiste aisément aux contraintes de compression ou d’inclinaison. Les hernies discales sont exceptionnelles. En revanche, l’os en croissance est fragile. Quand la colonne vertébrale se cambre, les arcs postérieurs s’impactent. Ils sont pris en tenaille. Les chocs finissent par les fissurer. Il se constitue une véritable fracture de fatigue. En langage médical, on parle de « spondylolyse ». Le plus souvent, elle se localise sur la dernière vertèbre, la 5e lombaire. Cette lésion est inhérente à la verticalisation et au dos creux. Elle n’existe ni chez les quadrupèdes, ni chez les humains handicapés n’ayant jamais marché. On la retrouve chez 3 à 6 % des enfants… et dans les mêmes proportions chez les adultes sédentaires. Ces chiffres confirment tout simplement que cette lésion se constitue obligatoirement avant la fin de la croissance ! Elle touche 20 % des sportifs de haut niveau. Plus la discipline impose de cambrer le bas du dos, plus ce ratio augmente. Ainsi, 60 à 70 % des gymnastes et des pratiquants du plongeon en sont victimes. Parfois, la fracture se produit aussi sur les vertèbres sus-jacentes, 4e voire 3e lombaire. C’est notamment le cas chez les professionnels du cirque et autres contorsionnistes.


Illustration : Mathieu PINET

  • Fréquent mais néfaste !
Cette lésion est fréquente chez l’adulte. Pourtant il faut la traiter dès l’enfance ! En effet, la fracture sépare les petites articulations situées sur l’arc postérieur et le gros bloc osseux antérieur appelé « corps vertébral ». Du fait de la cambrure, ce dernier risque de glisser vers l’avant. On parle de « spondylolisthésis ». Dans 85 % des cas, le décalage entre les 2 vertèbres est stable et modéré, inférieur à 1/3 de la longueur du disque intervertébral. Souvent, il ne fait pas mal. Lorsque la vertèbre cassée est plus étroite en arrière qu’en avant, si celle située en-dessous est très inclinée ou en forme de toboggan, l’aggravation est probable. Exceptionnellement, il arrive que la vertèbre du haut passe complètement en avant de sa voisine du bas et tombe en avant du bassin ! C’est la « spondyloptose ». À tous les stades, des douleurs peuvent survenir au fil des ans. En effet, le disque est soumis à des contraintes de cisaillement alors qu’il est conçu pour assumer une compression. Ses anneaux fibreux se déchirent, le liquide gélatineux contenu au milieu peut même sortir et former une hernie discale. Parfois, un gros noyau fibreux et distendu s’est formé en remplacement du cal osseux. C’est le « nodule de GILL ». Il arrive que ce dernier soit irrité par la répétition des impactions lors des hyperextensions de la colonne. Plus ennuyeux, il peut toucher, voire emprisonner, le nerf sciatique qui sort du canal vertébral juste à cet endroit. Cette fois, les douleurs lombaires irradient dans la jambe !


Illustration : Mathieu PINET

  • Profitez de la fracture !
Chez l’adulte, plusieurs années après la constitution de la fracture, il ne subsiste aucun potentiel de consolidation. En revanche, chez l’enfant, au cours des semaines qui suivent la survenue des  douleurs, la spondylolyse peut cicatriser. D’où l’importance de ne pas rater le diagnostic ! Voilà pourquoi « tout lumbago de l’enfant est une fracture de fatigue… jusqu’à preuve du contraire ». En pratique, devant de tels symptômes, votre médecin du sport prescrit une radiographie. Si une fracture est visible, il est indispensable de savoir si elle est récente. Pour cela, il est nécessaire de réaliser une I.R.M. ou une scintigraphie. Le premier examen montre une inflammation et un œdème autour de la zone nouvellement cassée. Le second consiste à injecter dans le sang une substance qui se fixe sur l’os qui travaille. Tant que le tissu osseux tente encore de réparer la fissure, le produit se concentre dans les arcs vertébraux. Une caméra détecte cette hyperactivité. Dans ces circonstances, une immobilisation mérite d’être tentée !

  • Un traitement contraignant, pas toujours efficace… mais indispensable !
Si la fracture est récente, si elle peut encore consolider, un corset s’impose. Il est réalisé sur mesure et bloque l’extension du dos. Il est dit en « délordose ». Classiquement, il est à conserver toute la journée pendant 3 mois. La nuit, il est théoriquement inutile car, souvenez-vous, il s’agit d’une blessure provoquée par le redressement et la verticalité. Certains médecins tentent de limiter à 6 semaines l’immobilisation ; d’autres la prolongent jusqu’à 4 ou 6 mois en fonction des résultats. Pendant toute cette période, une rééducation visant à réduire la cambrure est conseillée. Le vélo, en vous plaçant légèrement penché en avant, permet de garder la forme pendant les semaines d’immobilisation. La natation est contre-indiquée. Malgré son image favorable, elle creuse le bas de la colonne. Au retrait du corset, les études mettent en évidence 60 à 80 % de consolidation. Dans le cas contraire, même si le cal osseux ne s’est pas formé, les douleurs se sont souvent apaisées.

  • Prévention pour toujours !
Consolidation ou non, glissement ou non, douleur ou non, la prévention est définitivement indispensable ! La rééducation doit se poursuivre pour limiter le dos creux et automatiser cette nouvelle posture. Il faut assouplir les muscles situés à l’arrière de la colonne et des cuisses. Il est opportun de renforcer les abdominaux et surtout d’optimiser leur coordination afin qu’ils ne se laissent pas distendre. Le travail de gainage regroupe les exercices emblématiques. Il est effectué d’abord sur des appuis stables puis en utilisant des coussins et des ballons. Il ne faut pas hésiter à modifier le geste sportif afin de limiter la cambrure du dos. Exemple : un tennisman doit apprendre à armer son service en privilégiant la rotation de son bras et la flexion de ses genoux. Le pli souvent, ces mesures parviennent à apaiser les souffrances du sportif. Certains médecins proposent d’infiltrer le nodule de cicatrisation resté inflammé. Parfois, une opération est envisagée. Habituellement, le chirurgien prélève un bout d’os dans le bassin. Il l’insère à la place du nodule de cicatrisation mou et inefficace puis le visse en comprimant l’ensemble. Là encore, une immobilisation par corset s’impose pendant 3 mois.



Source SantéSportMag

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